A quelques encablures des fêtes les producteurs de caviar sont en pleine effervescence. Nous sommes allés à la rencontre de l’un d’eux, Perlita, au Teich, sur le Bassin d’Arcachon en Aquitaine.

Le caviar, les oeufs d’esturgeon, perles noires appréciées tant pour leurs délicates saveurs que pour leur rareté qui en fait un produit de luxe, a connu une véritable mutation de son marché depuis quelques décennies.

Tout d’abord n’oublions pas qu’aujourd’hui le caviar n’a plus rien de russe ni d’iranien et donc de sauvage. En effet, depuis 1998, le commerce international de toutes les espèces d’esturgeons est réglementé par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES).

Ainsi tous les esturgeons et les produits qui en sont issus (caviar, chair, peau, etc.) doivent être couverts par un permis. Les quotas de pêche de la Mer Noire et de la Mer Caspienne (90 % du caviar sauvage dans les années 90) n’ont jamais été respectés et de fait la CITES interdit depuis 2011 la production d’œufs d’esturgeons sauvages.

La France, qualité et traçabilité

De toutes les façons l’esturgeon sauvage a quasiment disparu, victime à la fois de la surpêche et de la pollution. Résultat, désormais 100 % du caviar mondial est produit en élevages… Et à ce petit jeu c’est bel et bien la Chine qui s’est imposée comme premier producteur mondial, l’Italie juste détrônée et la France complètent le podium. On notera que la l’Hexagone est le seul pays producteur de caviar à garantir un élevage uniquement à base de farine végétale sans OGM et chair de poisson, une alimentation 40% plus chère que celle utilisée ailleurs

Et en France la région de production de caviar et donc d’élevage d’esturgeons n’est autre que le Sud-Ouest. 6 producteurs sur les 7 français sont en Aquitaine, l’autre est en Sologne. 

En 2013 ils sont quatre à se regrouper pour créer L’Association Caviar d’Aquitaine (ACA) dans le but de défendre et promouvoir l’origine, les conditions d’élevage de l’esturgeon ainsi que les normes de production du caviar d’Aquitaine, soit plus de 80% de la production hexagonale. Pour cela un cahier des charges commun et très stricte a été mis en place, et une demande d’IGP (Indication Géographique Protégée) est en cours.

Les quatre producteurs sont le Groupe Kaviar (Sturia, Akitania, Siberia, Sturgeon, Ikka), Caviar de France (Diva, Ebene) et Aquadem (Perle noire) et L’Esturgeonnière (Perlita). Nous sommes allés à la rencontre de ce dernier, au Teich, sur le Bassin d’Arcachon.

L’Esturgeonnière a vu le jour en 1991 sous la forme d’une ferme piscicole d’élevage d’esturgeons, mais dans le but d’en exploiter la chair et non les oeufs. La tentative échoue et, il y a 25 ans, Michel Berthommier, jeune ingénieur agronome spécialisé en pisciculture, se retrouve sur place pour son employeur de l’époque et commence à travailler à la production de caviar. 50kgs de caviar sont produits et deux ans plus tard la marque Perlait voit le jour.

En 2006 d’importants travaux de mise aux normes, avec notamment une filtration mécanique à 35 microns doublée d’une filtration biologique sur lits fluidisés. Systèmes uniques en Europe qui permettent à l’eau de ressortir en milieu naturel avec les mêmes qualités, si ce n’est encore meilleures, que lors de son captage dans la Leyre, rivière voisine se jetant dans le Bassin d’Arcachon. Les matières sèches sont ensuite valorisées pour de l’épandage à la place de fertilisants chimiques agricoles ou pour du compost.

Un an plus tard Michel Berthommier, accompagné d’un ami ainsi que d’un groupe de financiers, rachète l’Esturgeonnière avant de créer l’écloserie Nurseteich en 2008. L’Esturgeonnière devient la première entreprise  française à maîtriser tout le cycle de production de caviar sur un même site, de la reproduction au conditionnement en passant par la naissance des alevins et l’élevage dans différents bassins, garantissant une excellente traçabilité et une production.

Ces efforts ont plus que porté leurs fruits puisque Perlita a reçu de l’Etat en 2012 le label Entreprise du Patrimoine Vivant (EPV) et obtenu le 30 novembre 2018 la certification à la norme internationale ISO 22 000. Le seul détenu dans le monde des producteurs de caviar français, qui place l’entreprise à la pointe de la sécurité alimentaire du secteur, un atout à l’export.

En 25 années l’entreprise, qui compte aujourd’hui 15 salariés, a su se développer dans le respect de l’environnement (42 bassins répartis sur 5.000 m2 accueillant 280 tonnes de poissons, mâles et femelles confondus) dans une recherche constante de qualité du produit. 

Elle produit de 4 à 6 tonnes de caviar pour un chiffre d’affaires qui devrait atteindre les 3 millions d’euros (dont 28% réalisés à l’export dans 32 pays, notamment aux USA, au Japon et au Pérou).

Le long processus de production du caviar

Nous avons eu la chance de pouvoir suivre le processus de production de caviar de L’Esturgeonnière, qui demande un véritable savoir faire et beaucoup de patience ! 

En effet tout commence ici dans la Nurseteich où 50.000 alevins d’esturgeons de l’espèce Acipenser Baeri naissent au début du printemps pour y grandir tranquillement jusqu’au début de l’été. Seuls 35.000 d’entre eux seront sélectionnés.

Ceux-ci sont alors placés dans de petits bassins extérieurs alors qu’ils ne pèsent qu’une dizaine de grammes. Ils poursuivent leurs croissance avant d’emprunter des tuyaux d’eau pour rejoindre, sans stress, des bassins alimentés par l’eau de la Leyre maintenue toute l’année entre 14° et 17°.

Ce n’est que vers l’âge de 2 à 3 ans qu’une échographie va permettre de déterminer le sexe des esturgeons et donc de leur avenir. Les mâles seront vendus frais pour leur chair ou sélectionnés pour être de futurs reproducteurs. Les  femelles qui produisent les oeufs poursuivent leur croissance et sont marquées d’une puce électronique.

Une seconde échographie va être pratiquée autour de 8 à 9 ans, afin d’obtenir un état des femelles et de leurs oeufs. Non seulement ceux-ci doivent être en quantité suffisante, mais aussi d’une taille minimale de 2,6 mm. Si les critères de sélection ne sont pas remplis l’esturgeon femelle est remis à l’eau dans l’attente de son prochain cycle. A ce niveau de croissance, ce sont entre 7.000 et 7.500 femelles qui sont en mesure de produire autour de 4 tonnes de caviar.

Lorsque l’échographie est concluante, les poissons sont sélectionnés pour la production de caviar. Ils rejoignent alors le laboratoires aux conditions d’hygiène drastiques. C’est à ce moment que la gonade (la poche qui contient les oeufs) est prélevée. 

Les grains sont minutieusement triés par lot en regard de trois critères:  la taille, la couleur et la texture des grains. Ils vont être tamisés avec beaucoup de soin, rincés avec un incroyable tour de main afin de ne pas être abimés. On y ajoute ensuite du sel officinal le plus pur possible, sont délicatement brassés et enfin égouttés avant leur mise en boîte.  Entre l’assemblage à la mise en boîte, moins d’une heure et demie s’écoule. 

Les oeufs représentant en moyenne 10 % du poids moyen d’un esturgeon adulte qui est autour de 6 kg, soit environ 600g de caviar récolté par poisson.

Aujourd’hui les femelles bien nettoyées ne sont plus jetées comme autrefois. En effet la chair de l’esturgeon semble avoir trouvé un public et depuis fin 2017 Perlita propose une gamme Epicerie. Il s’agit de recettes de tartinables ou de tapas à base de filets d’esturgeons cuisinés avec tantôt des citrons rôtis, des piquillos  et même du caviar.

En ce qui concerne les oeufs, le Caviar Perlita propose à la dégustation des grains de 2,6 mm de diamètre minimum. On le consomme jeune, peu de temps après la récolte pour sa finesse, ou affiné plusieurs mois après sa production pour une saveur plus marquée. Les prix s’échelonnent entre 42 euros pour la boite de 20g à 950 euros la boite de 500g.

Pour répondre à la demande de ses consommateurs Perlita propose depuis 2011 la gamme Rare. Il s’agit d’un caviar aux plus gros grains (minimum de 2.8 mm de diamètre.) Ce caviar premium issu d’un travail de sélection minutieux en laboratoire représente 3% de la production. Les prix vont alors de 54 euros la boite de 20g à 1.190 euros le boite de 500g.

Enfin, il faut savoir que le caviar est un produit de luxe, essentiellement consommé durant la période des fêtes (80% des ventes !) alors quoi de mieux que de proposer un élégant coffret, idéal à offrir ou pour encore plus de plaisir lors des moments d’exception.

Pour accompagner la boîte de caviar Perlita de 20, 30, 50 ou 100g, 2 cuillères en nacre y sont glissées ainsi qu’une clé d’ouverture. Le tout au dessus d’un gel pack réfrigéré parfaitement dissimulé sous la boîte, afin de conservé la fraicheur au caviar durant toute la dégustation.

Notons que l’Esturgeonnière propose des visites sur rendez-vous (en dehors de la forte période de production de septembre à février), pour découvrir l’exploitation et les techniques d’élevage des esturgeons destinés à la production de ce caviar d’Aquitaine.

Une initiation à la dégustation clôture l’atelier avec la découverte du caviar Perlita jeune et affiné. 1h30 de visite et dégustation et bien sûr la possibilité d’acheter le caviar Perlita en fin de visite – 28 euros par personne. Renseignements sur le site de Perlita.

Visite en images de la maison de caviar d’Aquitaine Perlita

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